Aujourd’hui je prends la
plume (le clavier) pour partager avec vous mes réflexions sur ma situation
actuelle. Dans un des groupes où je suis, une jeune femme m’a,
involontairement, rappelé la solitude dans laquelle je vis au quotidien.
Ma santé s’étant
détériorée depuis un an, je ne peux plus conduire, et je ne sais pas si je
pourrais reconduire une voiture classique un jour. Nous habitons une ferme que
nous avons rénovée, dans un petit village tout ce qu’il y a de plus charmant.
Seulement, à cause de mon handicap, cette vie m’a complètement isolée.
Pendant longtemps j’ai cru
avoir des amis pour qui j’étais importante, j’ai cru que ces amis feraient tout
pour être là pour moi, comme j’ai été là pour eux, afin de m’aider, de me
soutenir et de m’aimer. Mais cette dernière année, ces amis m’ont prouvés que
je n’étais rien pour eux, ou en tout cas pas assez importante pour faire la
moitié de ce que j’ai fait pour eux.
Peu importe, je suis
partie du principe que ces personnes n’avaient donc rien à faire dans ma vie.
Mais comme ils étaient mes meilleurs amis depuis plus de 15 ans, cela m’a fait
énormément mal et je ne m’en suis pas encore totalement remise.
Mes vrais amis, ceux pour
qui je compte et qui comptent pour moi, sont géographiquement loin, et bien qu’ils
soient toujours dans mon cœur, la distance est parfois difficile à vivre pour
moi au quotidien.
Mon homme, que j’ai
énormément de chance d’avoir, qui est là pour moi le plus possible, qui me
soutiens, m’aime telle que je suis, et fais tout pour me faciliter la vie, est
infirmier. De ce fait il bosse 12h/jour, et comme nous habitons à une heure de
distance de l’hôpital où il travaille, il part à 7h00 et revient entre 21h00 et
21h30.
Alors je ne suis pas
malheureuse d’être seule, j’ai appris à me contenter de moi-même, mais parfois
j’aimerai bien pouvoir prendre la voiture ne serait-ce que pour aller acheter
du pain, voir du monde, bref sortir des murs de ma maison.
Mais je ne peux pas. Je ne
peux plus conduire de voiture classique, et cela m’isole encore plus du reste
du monde. Mon médecin généraliste m’a dit que je devrais voir pour faire
adapter ma voiture et avoir les commandes au volant. Dans l’absolu c’est
effectivement l’idéal, mais :
- Cela implique de
refaire des stages de conduite pour apprendre à conduire avec les commandes au
volant, car il faut changer tous ses réflexes appris depuis des années de
conduite.
- Cela implique d’avoir
une voiture adaptée, et comme la mienne est vieille et que dans l’idéal j’aurai
dû en changer depuis longtemps, je ne me vois pas faire adapter ma voiture si c’est
pour devoir en changer un an plus tard.
Et tout cela coûte de l’argent
que je n’ai pas.
Alors en attendant j’ai la
chance d’avoir mon homme qui me conduit là où j’ai besoin les jours où il ne
bosse pas. Mais justement, cela veut juste dire que je dépends complètement de
lui. Ma liberté s’est restreinte, elle se limite à ce que je peux faire chez
moi.
La semaine prochaine (le
24) je revois mon chirurgien. Je ne sais absolument pas s’il aura une solution.
Je suis dans le flou total, et j’ai peur de ne plus jamais avoir mon
indépendance. Et même si mon homme fait les choses pour moi avec plaisir et le
sourire, parfois je culpabilise de toujours lui en demander plus. Et en même
temps il est le seul en qui j’ai totalement confiance pour lui confier chaque jour
mon corps et mon cœur, mes angoisses et mes peurs, sans avoir la hantise de l’embêter,
le déranger ou autre.
Pour le moment il m’est
psychologiquement difficile de m’accepter totalement comme je le faisais il y a
un an. J’avais déjà mis plusieurs années à ne plus culpabiliser de qui je suis,
à me respecter moi-même et m’accepter en entier, avec toutes mes contraintes et
mes contradictions.
Mais depuis un an ces
contraintes ont encore augmentées, je dois encore m’adapter, réfléchir à chaque
geste, chaque pas que je fais pour ne pas me faire mal. Je dois encore accepter
de voir mon autonomie diminuée, alors même que je venais à peine de recommencer
mes projets professionnels en fonction de mes contraintes du moment.
Et bien ces contraintes
sont aujourd’hui multipliées, mes projets sont en pause car je ne sais pas ce
que l’avenir me réserve, et que dans l’état actuel de mes genoux je ne peux
pratiquement rien faire seule en dehors de chez moi.
Et pourtant je ne crois
pas être psychologiquement capable de ne plus jamais travailler, sans même
parler de l’aspect financier. Je n’ai que 34 ans, il y a tellement de choses
que j’ai envie de faire, je tiens au projet professionnel que j’ai élaboré en
formation. Mais pour le moment je n’ai aucun moyen de le mettre en œuvre.
Alors me voilà, vous
livrant ma solitude et mes interrogations, mes doutes et mes peurs.
Seule sans être seule, je
vis mon quotidien comme il vient, me réjouissant de chaque petit moment de
bonheur que m’offre la vie, car il est pour moi hors de question de sombrer
dans la dépression et le chagrin, je m’efforce de voir le bon côté des choses
afin d’avancer et de me construire un avenir.
Mais parfois un mot, une
photo me ramènent à cette réalité :
Je suis seule sans être seule